1. Qu’est-ce que le CEMS-T ? Quel est son rôle ?
Le CEMS-T, créé en 2023, est l’héritier de plusieurs organismes qui ont piloté depuis plus de 100 ans l’enseignement militaire supérieur Terre. Il est subordonné au général directeur des ressources humaines de l’armée de Terre depuis cet été. Son rôle est d’orienter et de commander les 4 écoles de l'enseignement militaire supérieur des 1er et 2e niveaux de l'armée de Terre. Il veille à garantir l’excellence de la formation qui doit répondre au besoin opérationnel des forces terrestres, lui-même conditionné par les menaces et l’évolution de la conflictualité. Dans ce cadre, il entretient des liens privilégiés avec la doctrine, le retour d’expérience, la prospective et l’innovation.
Les deux grandes missions du CEMS-T sont de former les chefs et experts de l’armée de Terre de demain, et de contribuer à la pensée militaire, tout en développant des partenariats en France et à l'international.
Dans le détail, nous avons la charge d’enseigner la tactique et le travail en état-major, afin de préparer les futurs chefs militaires d’active et de réserve, ainsi que des officiers alliés, au commandement en opération et à l’exercice des responsabilités dans des postes de direction qui exigent des compétences scientifiques et techniques.
Nous participons également aux travaux de réflexion de l’armée de Terre tout en contribuant aux relations internationales des armées dans le secteur de l'enseignement militaire supérieur et de la pensée militaire : écoles militaires étrangères, stagiaires étrangers, enseignants et chercheurs étrangers, universités étrangères, laboratoires d’idées, organisations multinationales, etc.
Enfin, nous croisons les expériences et les approches avec le monde civil grâce à des échanges et en accueillant des auditeurs civils à l’École de guerre Terre.
2. Comment s’organise l’enseignement militaire supérieur en 2023 ?
Je dispose d’un état-major qui coordonne les actions des 4 écoles.
L’École d'état-major (EEM) à Saumur forme les officiers et sous-officiers de l'armée de Terre, mais aussi des directions ou services, destinés à servir en état-major. Nous préparons les officiers subalternes à la tactique pour leur permettre d’évoluer au sein des postes de commandement de groupements tactiques interarmes (GTIA) ou de brigades interarmes (BIA). Nous les formons également à mieux appréhender l’environnement opérationnel et nous les incitons à proposer des solutions tactiques.
Au-delà des connaissances théoriques, ils mettent en pratique les savoir-faire dans des exercices en simulation, dans des jeux de guerre, sur carte, sur des ordinateurs ou sur le terrain, parfois dans des études historiques, toujours avec un thème de combat de haute intensité.
L'École de guerre - Terre (EDG-T) forme aussi à la tactique, au combat interarmes et au travail en état-major, à l’élaboration des ordres, mais à un niveau supérieur (BIA et Division, voire même Corps d’armée) les chefs militaires sélectionnés par voie de concours. Ils sont préparés à l'emploi spécifique des grandes unités des forces terrestres dans le contexte des engagements actuels et des futures conflictualités. À ce titre, les exercices qu’ils conduisent les placent systématiquement dans un engagement majeur de haute intensité, dans le cadre d’une opération multinationale, le plus souvent comme nation cadre.
Ils sont engagés chaque année dans au moins un exercice d’envergure à l’étranger avec des alliés. Le but est la maîtrise de principes tactiques presque immuables, tout en ayant conscience des évolutions des menaces et de l’environnement opérationnel, afin de mieux anticiper les mutations de la guerre.
L'École supérieure des officiers de réserve spécialistes d'état-major (ESORSEM) forme les officiers et sous-officiers de réserve de l'armée de Terre, destinés à servir en état-major. Elle intègre également les problématiques de combat de haute intensité, de la même manière que l'EEM et l'EdG-T, dont elle est l'équivalent pour les militaires de réserve.
Elle s’apprête à former deux fois plus de cadres, en amont du doublement des effectifs de la réserve décidé en juillet 2023.
Enfin, l’enseignement militaire supérieur scientifique et technique (EMSST) répond aux besoins de l’armée de Terre en officiers experts de haut niveau qui maîtrisent les compétences technico-opérationnelles indispensables à la conception, à la préparation et à l’engagement des forces. Les domaines d’expertise recherchés s’inscrivent à la fois dans le cadre des mutations technologiques (transition numérique, cybernétique, intelligence artificielle, sciences cognitives, systèmes automatisés…) mais aussi dans les évolutions humaines de l’environnement des opérations (relations internationales, géopolitique, sociétés, cultures et langues, guerre économique ou informationnelle, influence…).
L’EMSST s’appuie sur un réseau de partenaires académiques d’excellence sélectionnés parmi les grandes écoles et universités.
Les écoles ont des revues de programme annuelles de façon à les orienter régulièrement en fonction de notre analyse de la conflictualité et du besoin opérationnel. Par exemple, nous souhaitons acquérir davantage de compétences en cyberdéfense ou en en compréhension des guerres économique et d’influence. C’est pourquoi il nous faut identifier à la fois les écoles ou universités les plus pertinentes et les profils d’officiers adaptés, afin de les former rapidement dans ces domaines critiques et émergents.
3. Quels sont les enjeux de la formation militaire supérieure ?
Il s’agit de préparer les futurs chefs aux nouveaux visages de la guerre, sans pour autant oublier les anciens, qu’il soit question de combats de haute intensité, de guerre numérique ou cognitive. Nous avons donc le devoir de préparer au mieux les futurs chefs, de leur transmettre les savoirs, savoir-faire et savoir-être nécessaires à la réalisation de leur mission, quelles que soient les conditions ou les menaces auxquelles ils seront confrontés, ce qui nécessite agilité, créativité et résilience, mais aussi et d’abord volonté, intelligence et efficacité.
Je fais confiance à nos quatre écoles, à leurs directeurs et à leurs cadres, totalement investis dans cette belle mission. Ils savent transmettre les savoirs et mettre en situation les officiers, nourrir leur envie de s’instruire et éveiller leur curiosité. Aussi je demeure persuadé que les réussites et les victoires se construisent d’abord sur le savoir, la transmission des connaissances et de l’expérience, le développement de la pensée militaire et des forces morales.
« La formation des futurs chefs militaires est une arme essentielle pour remporter des batailles ». C’est l’un des préliminaires essentiels à la guerre cognitive. Pour gagner, nous avons besoin de réflexion, d’anticipation, de capitalisation, de travail d’équipe et d’organisation ; car la guerre s’anticipe et se prépare. Ensuite, les concepts élaborés, les nouvelles doctrines diffusées ou le retour d’expérience contribuent naturellement à l’enseignement et orientent l'entraînement.
C’est ici que la vision du Commandement du combat futur (CCF)[1] rejoint celle du CEMS-T.
Après avoir acquis les compétences d’officiers supérieurs pour conduire le combat interarmes, celui des forces terrestres, au sol et près du sol, les officiers brevetés de l’École de guerre reçoivent un complément de formation à l’école de guerre interarmées afin d’appréhender le conflit plus global, avec toutes les composantes et dans tous les champs de confrontation : terre, air, mer, espace, spectre électromagnétique, cyber et information.
Au-delà , le CEMS-T collabore régulièrement avec la vingtaine d’organismes militaires de l’École militaire, tous ouverts sur le monde civil et l’international, qui sont regroupés depuis octobre 2023 au sein de la communauté ACADEM.
[1] Nouvel organisme créé le 01/08/2023, le CCF est chargé de la prospective, du RETEX, de la doctrine, des expérimentations et de l’innovation pour l’armée de Terre.